Strasbourg à vélo lance la semaine des conflits piéton·ne·s-cyclistes. Retrouvez chaque jour le top du top des aménagements cyclables qui entretiennent ces conflits.
Résumé des épisodes précédents : La ligne G | Le ring | Le secteur de l’Université |
Épisode 4
Le facteur terrasses : moins d’espace pour plus de conflits
A SAV, on adore les terrasses, qu’on fréquente aussi assidûment que les pistes cyclables. Alors quel rapport entre les conflits piéton·nes/cyclistes et ces lieux de détente prisés des Strasbourgeois·es ? Peut-être que lorsque la gestion de l’espace est inadaptée et que la circulation des usagers est entravée par l’extension de certaines terrasses dans des lieux où la place manque, cela pourrait avoir un impact sur la cohabitation ?
Au centre-ville, les aménagements innovants qui ont été développés dans les années 90, ont permis une cohabitation relativement harmonieuse entre les piéton·nes et les cyclistes pendant des années.
Alors pourquoi la situation change-t-elle aujourd’hui ? Pourquoi piéton·nes et cyclistes ont soudain l’impression de ne plus pouvoir partager sereinement l’espace ?
Parce que l’espace diminue !
Depuis des années, le succès de la politique cyclable et marchable de la ville a mené à une augmentation importante à la fois du nombre de piéton·nes mais aussi de cyclistes qui fréquentent le centre-ville. C’est une excellente nouvelle !
Hélas, devant cette évolution des usages, plutôt que d’adapter les infrastructures, en proposant par exemple une traversée nord/sud et est/ouest en site propre pour les cyclistes, comme le demande SAV depuis plusieurs années, la politique municipale depuis plusieurs mandatures a plutôt été de restreindre l’espace public en multipliant les autorisations de terrasses.
Ainsi la Grand Rue, souvent citée en exemple de rue très conflictuelle, a vu par endroit sa largeur diminuée par deux en raison de l’emprise des terrasses.
Comment, en diminuant l’espace alors que le nombre d’usagers augmente, la circulation au centre-ville pourrait-elle être apaisée ?
Surtout que la Grand Rue est un axe pour rejoindre la gare, par les touristes (nombreux, à pieds) mais aussi par les travailleurs et travailleuses strasbourgeois·es (nombreux·ses également et souvent à vélo), et qu’aucune alternative sérieuse n’existe actuellement (et le ring, avec son tracé délirant et très excentré via l’hôpital fermé la nuit, n’en sera pas une non plus, quoi qu’en disent nos élu·es).
L’espoir a été fort pour les cyclistes, lors de la rénovation de la rue du 22 novembre, de se voir proposer enfin un itinéraire cyclable qui permettrait de contourner efficacement la Grand Rue. Et sur le papier, c’est ce qui aurait dû se passer !
Le projet Rue du 22 novembre, avec de gigantesques trottoirs et une belle piste centrale
Source : Chemins Indiens – https://chemins-indiens.com/2020/04/08/les-nouvelles-oasis-du-centre-ville-de-strasbourg-2/
Malheureusement, il n’en a rien été puisqu’en moins de 5 ans, alors qu’il n’y avait AUCUN commerce de bouche dans cette rue à l’exception d’un snack de vente à emporter, l’intégralité des trottoirs est désormais occupée par des terrasses gigantesques.
Piéton·nes et cyclistes ne peuvent que se marcher dessus dans l’espace central extrêmement contraint de 3m qui devait à l’origine être dédié aux cyclistes. Et en moins de 5 ans, ce qui devait être une bonne alternative cyclable est devenu un axe encore plus conflictuel que la Grand Rue. Personne n’aurait cru cela possible à l’époque…
Et les exemples sont nombreux, de lieux où l’espace piétonnier est privatisé pour l’usage des terrasses, ce qui contraint les piéton·nes à se déporter sur des pistes cyclables devenues inadaptées. Prenons par exemple la rue du travail au niveau du Bar la Solidarité.
Ce bar ne bénéficiait pas à l’origine de terrasse. Mais il a fini par obtenir l’autorisation d’une exploitation en extérieur et on est ravi·es pour eux.
Mais plutôt que de revoir l’aménagement de ce secteur, il a simplement été décidé de placer la terrasse sur le trottoir, ne laissant plus aucune place pour circuler à pied. Les poussettes, les fauteuils roulants, les enfants et la plupart des personnes à pied empruntent donc la piste cyclable.
Il aurait pourtant été simple de retirer la piste du trottoir et de la déplacer sur la chaussée, afin de prendre l’espace de cette terrasse non pas aux piétons mais aux automobilistes ! Encore une fois, c’est bien l’aménagement qui provoque le conflit.
Des projets qui entretiennent les conflits
On pourra citer également la rue du Jeu des enfants, récemment piétonnisée et dont la rénovation prochaine va accentuer les conflits : les trottoirs vont être mis à niveau et les terrasses vont s’étendre jusqu’à ne laisser, comme pour la rue du 22 novembre, que quelques mètres pour les véhicules motorisés, piéton·nes et cyclistes.
Quel dommage que la priorité ne soit pas de rendre la ville agréable pour tous, mais de générer des conflits qui pourraient être évités.
Avenue des Vosges, il est encore temps de rectifier le tir !
Et malheureusement, le projet de la municipalité pour l’avenue des Vosges va reproduire ces schémas déjà vus maintes fois : proposer des pistes cyclables longeant des trottoirs peu larges et sur lesquels en un rien de temps viendront se positionner les terrasses de toutes les boulangeries, restaurants et salons de thé, actuels ou futurs, qui voudront, et c’est bien légitime, bénéficier de l’apaisement de cet axe emblématique de la ville !
SAV avait pourtant proposé une solution permettant de préserver l’intégrité des trottoirs, tout en permettant l’insertion de terrasses et de lieux de vie, de maintenir du stationnement automobile en créneau entre les arbres et de garantir un espace sécurisé pour les cyclistes.
Notre proposition n’a à ce jour pas été retenue par la ville, sans que ne nous soit donné d’explication valable.