L’association Strasbourg à vélo se félicite du projet d’apaisement de l’avenue des Vosges et de la volonté de la ville de Strasbourg de rendre l’espace aux habitants. Toutefois, l’emplacement des pistes cyclables avenue des Vosges tel que proposé par la ville de Strasbourg nous pose question. Leur positionnement le long du trottoir et surtout entre le trottoir et les terrasses (actuelles ou futures) nous semble non seulement peu approprié à l’évolution de cette avenue et aux besoins de ses habitants, mais surtout peu propice à une cohabitation sereine et apaisée entre piétons et cyclistes. Nous demandons à nos élus de revoir leur copie !
Aujourd’hui les retours de l’ensemble des usagers sont unanimes : la cohabitation entre piétons et cyclistes sur des espaces partagés, ou semi-partagés tels que les pistes positionnées le long des trottoirs, ne fonctionne plus. Conçues à une époque où le tout-voiture était encore la règle et où le vélo représentait un mode de déplacement minoritaire, ces pistes ne sont plus adaptées aux usages actuels en termes de mobilités actives et anticipent encore moins l’évolution vers des usages futurs. C’est pourtant ce que la ville nous propose pour ce projet à l’impact majeur sur la ville de demain !
La rénovation de l’Avenue des Vosges est un projet historique pour notre ville : elle doit marquer un changement de braquet quant aux priorités données aux différents modes de déplacement. Ce projet est engageant pour les décennies à venir : plutôt que d’aller vers un consensus mou et fade qui laissera un goût amer à tout le monde, c’est l’occasion pour la ville d’afficher (enfin) quelles sont ses ambitions et priorités pour amorcer la ville de demain avec panache.
Changer l’ordre des priorités
Nous sommes en 2023 et l’urgence climatique impose un changement de priorités : nous demandons que la pyramide des mobilités soit enfin respectée et que les propositions alternatives proposées par les associations soient enfin considérées avec sérieux. Il est grand temps pour nos élus de ne plus laisser leur peur irraisonnée de quelques accros de la voiture guider leurs choix. S’il est possible de faire preuve de courage et d’ambition sur le projet de Tram Nord à Schiltigheim, alors c’est possible aussi à Strasbourg !
Strasbourg à vélo, comme d’autres associations, a planché sur des propositions alternatives. Plusieurs options existent qui, toutes, prouvent qu’il est possible de sanctuariser les espaces piétonniers et de transformer cette avenue en une véritable rue à vivre qui soit à la fois marchable et cyclable !
Voici le projet porté par Strasbourg à Vélo : deux larges trottoirs de plus de 3m, deux pistes unidirectionnelles de 2,5m, séparées des piétons. Les pistes longent le tram comme dans d’autres secteurs, mais sont ici sécurisées par un espace d’1m entre le tram et la piste.
Des stationnement utiles sont maintenus sous les arbres, en alternance avec des espaces de vie végétalisés, des terrasses, etc. Le risque d’emportiérage est réduit par la distance entre le stationnement et la piste, et nous comptons sur la volonté de la ville pour canaliser le stationnement sauvage qui pourrait survenir sur la piste, grâce à la video-verbalisation.
Sur ce projet comme sur d’autres, on nous a servi trop de choix politiques maladroitement déguisés en arguments techniques. Nous n’avons pas confiance !
La séparation physique entre les pistes cyclables et les espaces piétonniers doit être le premier pré-requis de ce projet : c’est cette contrainte prioritaire qui doit conditionner les autres aménagements. Or dans la solution qui nous est proposée aujourd’hui, on pose en pré-requis la symétrie, l’emplacement des arbres, le stationnement à tel ou tel endroit comme immuables, et comme depuis toujours dans notre ville, les cyclistes et surtout les piétons deviennent les variables d’ajustement.
Ce n’est pas l’ambition que nous avons pour notre ville. Ce n’est pas le projet que nous avons pour l’Avenue des Vosges !
C’est pourquoi nous demandons que des leçons soient enfin tirées des erreurs du passé et que les aménagements existants dont nous héritons servent d’exemple à ne plus reproduire. Nous pensons particulièrement aux pistes cyclables qui jouxtent le tram Ouest à Koenigshoffen avec, par endroits, la piste bidirectionnelle la plus étroite de l’EMS ou à l’immense rue du 22 novembre où en dépit d’un très beau projet, cyclistes et piétons bénéficient après rénovation de moins d’espace pour se déplacer. Nous demandons que ce projet coûteux et nécessaire ne soit pas pris à la légère concernant la cyclabilité. Il doit prendre en compte les besoins des cyclistes d’aujourd’hui, mais aussi et surtout de ceux de demain.
C’est pourquoi SAV appelle à travailler l’avenue des Vosges comme un véritable projet d’urbanisme et sollicite l’intervention de la vice-présidente à l’urbanisme opérationnel. Une esquisse “vue de dessus” nous semble par ailleurs essentielle pour construire le foisonnement des usages, les interactions et la sécurité des vélos et des piétons.
Des plans d’aménagement inadaptés aux contraintes actuelles
Nous savons aujourd’hui qu’il est urgent et impératif de massifier les déplacements à vélo. Il est donc indispensable que les futurs aménagements soient efficaces, inclusifs et participent à la ville à vivre, et ce dès l’inauguration. Les élus doivent aujourd’hui porter une véritable ambition pour le vélo. Sans quoi, ils ne répondront tout simplement pas aux enjeux climatiques et sociaux qu’ils prétendent vouloir prendre à bras le corps. Les aménagements doivent en premier répondre aux besoins des plus fragiles : si nos enfants ne peuvent pas pédaler en toute liberté dès 10 ans, l’aménagement est mauvais.
Les trajets des cyclistes ne se limitent pas à l’hyper-centre et les aménagements des entrées de ville doivent être exemplaires dans ce sens, afin de donner l’assurance à toutes et tous qu’ils peuvent choisir le cycle en toute sécurité, y compris pour leurs déplacements professionnels.
Car aujourd’hui, le cycliste n’est plus seulement ce flâneur ou cette flâneuse qui vient se promener à vélo dans Strasbourg pour découvrir notre belle ville autrement. C’est aussi ce père de famille qui dépose ses enfants à l’école en vélo cargo, ces professionnel·les qui transportent du matériel dans une imposante remorque grâce à un vélo électrique, ou encore cette salariée qui rejoint à vélo son lieu de travail, situé parfois à plusieurs dizaines de kilomètres.
Tous·tes, ils contribuent à la ville à vivre. Car les pistes cyclables ne sont pas que des tuyaux reliant un point A à un point B : l’utilisateur vélo se transforme facilement en piéton et vice-versa. Les enfants peuvent jouer sur leur parcours vélo en revenant de l’école, des parents s’arrêter à la terrasse d’un café ou pour faire des courses. Ces interactions sont beaucoup plus fluides et fréquentes à vélo qu’en voiture.
Rappelons que quand la place de Haguenau a été créée en 1975, elle était surdimensionnée par rapport aux usages motorisés d’alors. Il est indispensable de prendre en compte le trafic cycliste qui devrait aisément s’approcher des 8 à 10 000 personnes par jour sur cet axe. À ce jour, nos élus n’ont pas été capables de nous fournir la moindre estimation des flux cyclistes attendus dans les prochaines années. Ce déficit de diagnostic nous inquiète sur la crédibilité des aménagements proposés.
Rappel des invariants cyclables
|
Proposition de sanction pour stationnement sauvage sur piste cyclable. Confiscation du véhicule motorisé pendant une semaine et amende correspondant au prêt gratuit d’un vélo, d’un vélo cargo s’il s’agit d’une camionnette.
En cas de récidive, la durée passé à un mois.
Rien de tel que l’expérience pour changer ses habitudes.